Les amis, je vous propose ( suite à l'idée de Gilles ) de mettre ici les articles que l'on souhaite publier.
Je vous mets là un texte mal léché, long, peut être pas dans le ton, inachevé, que j'avais commencé il y a un moment. Il touche Roger Claessen ( Maxime, je te refuse le droit de rigoler ), joueur de foot belge des années 60, au standard de Liège. Je sais que je suis inscrit en littérature et non en sport, mais, je vous soumet ça à avis, si vous pensez que ça peut être intéressant que je le refasse et que je le finisse.
Les coups de foudre réels n’existent pas. J’entends qu’il n’y a pas de coup de foudre physique entre êtres humains. Il n’y en a jamais eu et il n’y en aura jamais, je suis formel. Du vent ! Un mythe ! Rien de plus. Pas la peine de se focaliser et de se formaliser sur un petit couple banal qui prétend s’être séduit au « premier coup d’œil. » Celui qui pense avoir décelée l’âme sœur chez son conjoint dès les premières secondes est un imbécile. Il n’y a plus à débattre de ceci, surtout lorsque ce n’est pas le sujet.
Non, le seul amour entier et instantané possible est l’amour artistique. Englober de tout son cœur un artiste, un homme dès la connaissance de l’une de ses œuvres ou des lignes qui le racontent – amour par l’art – est bien le seul moyen de voir surgir l’arme de Zeus. Oui, d’abord le voir cet éclat de lumière qui illumine jusqu’aux champs les plus empêtrés d’obscurité. C’est physique, au commencement est la lumière. Les trois coups théâtraux sont un crime, il faut commencer par le visuel, attirer l’attention par une fulgurante illumination. Ensuite seulement peut venir le bruit. Le fracas patiente avant d’entrer en scène. Il nous bouscule le crâne alors que l’on ne l’attendait plus, pour nous rappeler l’éclair qui le précéda. Le temps entre les deux manifestations divines est variable, c’est ce qui fait sa force. Il est imprévisible. C’est un outil de mesure comme peut l’être une règle d’écolier, il sert à calculer la distance qu’il nous reste à faire jusqu’au point de chute. Commence alors le beau chemin vers ce qui a provoqué la splendide jalousie de l’Olympe.
Mon dernier coup de foudre – ils sont rares – est récent. Avant lui, il y eut, entre autres, Céline. Mon nouvel héros est né alors que Louis-Ferdinand publiait son dernier pamphlet : Les Beaux Draps, avant de se remettre au roman pour l’ultime trilogie.
Passionné de football, je lisais sur mon lit un magazine consacré à ce sport. Comme ils en existent des beaucoup moins bêtes que la caricature veut bien le laisser croire, celui qui était dans mes mains me gratifiait d’un article « légende ». C’est la moindre des choses pour un sport plus que centenaire. S’intéresser à son histoire n’a rien d’extraordinaire, même si aujourd’hui, peu ont l’intelligence ou la curiosité – ce qui revient au même – d’aller voir ce qui s’est passé pré-France98.
Quatre pleines pages sur l’artiste. L’article écrit en blanc sur fond noir brillant. Jeu de mot pour titre : Claessen X. Plutôt bien trouvé, quoique pas très éloigné de l’humour made in Ruquier. Suffisamment tape à l’œil pour que je m’y plonge à corps perdu. Nouvelle apparition divine : Claessen mon amour.
Idolâtrer Roger Claessen ne s’explique pas. Mieux vaut éviter les commentaires. On entre dans sa vie comme on entre en religion. C’est d’ailleurs par là qu’il a commencé, gamin. Sixième et dernier né d’une famille catholique, il trimbala sa jeune carcasse dans toutes les institutions qui peuvent se trouver sur la route d’un gosse destiné à entrer dans les ordres. Rien d’extraordinaire à cela lorsqu’on voit le jour dans les années 40. Mais c’était peine perdue, le Messie ne peut devenir prêtre. Il lui fallait faire des adorateurs, pas adorer. Il gardera qu’en même ses élans mystiques ; impossible de se détacher d’une enfance au sein d’une famille si chrétienne. Vouloir s’en séparer, en refusant adulte la discipline qu’on lui avait imposé minot, ne revenait qu’à la réaffirmer. On ne peut annihiler ses années en culottes courtes ; tout n’est qu’opposition ou continuation de celles-ci. Pas moyen d’en démordre. Chez Roger, cela offre une merveilleuse complexité. S’envoyer à toute berlingue dans une énième Alpha Romeo ou aller prier des heures durant dans la sérénité la plus parfaite, that is his question.
Roger Claessen est donc né le 27 septembre 1941 à Warsage, petite bourgade belge située dans la région Wallonne. On y parle français comme à Liège où il s’est éteint le 3 octobre 1982. Les dates sont posées. Si vous faites le calcul - très simple - vous arrivez à la conclusion qu’il a commencé à bouffer les racines de picenlit à l’âge de 41 ans. Il est toujours trop tôt pour se mettre à la table de ce banquet végétarien, même pour un écolo. Comme il n’a vécu qu’une moitié de vie, il n’a retenu que la première moitié du nom de son bled natal : War. Il a zappé le mot sage, pas eut le temps, pas envie. Son existence est une guerre, c’est tout. Une guerre contre l’ennui, une guerre contre le médiocre. Tant pis pour les morts que ça causerait, ils ne pouvaient qu’avoir tord.
Roger Claessen est mon idéal footballistique – comme on parle d’idéal féminin ou d’idéal artistique. Dans ma tête, c’est une fantasmagorie ; la rationalité est chassé pour laisser place à toute la mystique qu’il représente. Aujourd’hui plus que jamais, il faut être Claessenement réactionnaire. Montrer par lui toute la grâce d’un sport qui quoi qu’on en dise perd de sa superbe. Bien sur, il n’est pas le seul phare d’une époque révolue. On ne peut oublier les Best, Cruyff et autres héros cosmiques ; tous ces joueurs qui ont fait les beaux jours de la génération de mes parents. Tout cela est mort avec Maradona et Cantona. J’ai définitivement un temps de retard en tout. Hors jeu le mec ! Ils ne m’ont pas attendu, c’est affreux. Je n’aurais pas eu le loisir de voir évoluer des types de cette trempe. Plus rien n’était fait pour eux. L’heure est à l’argent seule motivation du premier footeux professionnel, l’heure est à la langue de bois, au joueur aussi lisse qu’idiot. Le roi est mort, vive le vide.
Claessen donc. Pour continuer à espérer. Pourquoi lui plutôt qu’un autre ? Peut être parce que l’histoire l’a un peu plus oublié, surement parce qu’il avait en plus une profonde admiration pour la littérature en générale et pour Dostoïevski en particulier. Dans ce milieu devenu si policé à sa manière, il faut voir le belge comme un homme, un vrai. Toute sa vie il a pensé le foot comme un plaisir. On l’imagine facilement considérer que le sport n’est qu’un art mineur – puisqu’il connaissait les autres ! – comme Gainsbourg considérait la chanson. Le football n’était pas tout. S’il avait été prêt à faire les efforts – et donc à sacrifier une partie de sa vie – on trouverait aujourd’hui sa face si incroyablement masculine sur des tonnes de t-shirts. Tant mieux qu’il se soit abstenu, qu’il soit resté fidèle à ce qu’il devait être : pas un footballeur : un monsieur. Vouloir le réduire au gazon vert n’a aucun sens. Roger fait éclater les lignes de touches ! Laissez lui de la place, Claessen fait exploser les stades !
Quels stades ? Celui du Standard de Liège d’abord, évidemment ! Le stade Maurice Dufrasne : l’enfer de Sclessin ! Réputé pour la ferveur de ses tribunes. C’est là qu’il a trouvé ses supporters les plus fidèles, le plus endiablés ! Quel régal pour eux de voir un week-end sur deux ce géant enchaîner les buts dans une ambiance de folie. Dix saisons avec les rouges, 229 matchs pour 161 buts : si ce n’est pas une histoire d’amour ça !
Mais la première fois que je l’ai vu jouer – dans une vidéo que l’on peut retrouver grâce au site de l’INA – c’était dans une enceinte qui a un goût particulier pour moi : Marcel Saupin.
Je vous mets là un texte mal léché, long, peut être pas dans le ton, inachevé, que j'avais commencé il y a un moment. Il touche Roger Claessen ( Maxime, je te refuse le droit de rigoler ), joueur de foot belge des années 60, au standard de Liège. Je sais que je suis inscrit en littérature et non en sport, mais, je vous soumet ça à avis, si vous pensez que ça peut être intéressant que je le refasse et que je le finisse.
Les coups de foudre réels n’existent pas. J’entends qu’il n’y a pas de coup de foudre physique entre êtres humains. Il n’y en a jamais eu et il n’y en aura jamais, je suis formel. Du vent ! Un mythe ! Rien de plus. Pas la peine de se focaliser et de se formaliser sur un petit couple banal qui prétend s’être séduit au « premier coup d’œil. » Celui qui pense avoir décelée l’âme sœur chez son conjoint dès les premières secondes est un imbécile. Il n’y a plus à débattre de ceci, surtout lorsque ce n’est pas le sujet.
Non, le seul amour entier et instantané possible est l’amour artistique. Englober de tout son cœur un artiste, un homme dès la connaissance de l’une de ses œuvres ou des lignes qui le racontent – amour par l’art – est bien le seul moyen de voir surgir l’arme de Zeus. Oui, d’abord le voir cet éclat de lumière qui illumine jusqu’aux champs les plus empêtrés d’obscurité. C’est physique, au commencement est la lumière. Les trois coups théâtraux sont un crime, il faut commencer par le visuel, attirer l’attention par une fulgurante illumination. Ensuite seulement peut venir le bruit. Le fracas patiente avant d’entrer en scène. Il nous bouscule le crâne alors que l’on ne l’attendait plus, pour nous rappeler l’éclair qui le précéda. Le temps entre les deux manifestations divines est variable, c’est ce qui fait sa force. Il est imprévisible. C’est un outil de mesure comme peut l’être une règle d’écolier, il sert à calculer la distance qu’il nous reste à faire jusqu’au point de chute. Commence alors le beau chemin vers ce qui a provoqué la splendide jalousie de l’Olympe.
Mon dernier coup de foudre – ils sont rares – est récent. Avant lui, il y eut, entre autres, Céline. Mon nouvel héros est né alors que Louis-Ferdinand publiait son dernier pamphlet : Les Beaux Draps, avant de se remettre au roman pour l’ultime trilogie.
Passionné de football, je lisais sur mon lit un magazine consacré à ce sport. Comme ils en existent des beaucoup moins bêtes que la caricature veut bien le laisser croire, celui qui était dans mes mains me gratifiait d’un article « légende ». C’est la moindre des choses pour un sport plus que centenaire. S’intéresser à son histoire n’a rien d’extraordinaire, même si aujourd’hui, peu ont l’intelligence ou la curiosité – ce qui revient au même – d’aller voir ce qui s’est passé pré-France98.
Quatre pleines pages sur l’artiste. L’article écrit en blanc sur fond noir brillant. Jeu de mot pour titre : Claessen X. Plutôt bien trouvé, quoique pas très éloigné de l’humour made in Ruquier. Suffisamment tape à l’œil pour que je m’y plonge à corps perdu. Nouvelle apparition divine : Claessen mon amour.
Idolâtrer Roger Claessen ne s’explique pas. Mieux vaut éviter les commentaires. On entre dans sa vie comme on entre en religion. C’est d’ailleurs par là qu’il a commencé, gamin. Sixième et dernier né d’une famille catholique, il trimbala sa jeune carcasse dans toutes les institutions qui peuvent se trouver sur la route d’un gosse destiné à entrer dans les ordres. Rien d’extraordinaire à cela lorsqu’on voit le jour dans les années 40. Mais c’était peine perdue, le Messie ne peut devenir prêtre. Il lui fallait faire des adorateurs, pas adorer. Il gardera qu’en même ses élans mystiques ; impossible de se détacher d’une enfance au sein d’une famille si chrétienne. Vouloir s’en séparer, en refusant adulte la discipline qu’on lui avait imposé minot, ne revenait qu’à la réaffirmer. On ne peut annihiler ses années en culottes courtes ; tout n’est qu’opposition ou continuation de celles-ci. Pas moyen d’en démordre. Chez Roger, cela offre une merveilleuse complexité. S’envoyer à toute berlingue dans une énième Alpha Romeo ou aller prier des heures durant dans la sérénité la plus parfaite, that is his question.
Roger Claessen est donc né le 27 septembre 1941 à Warsage, petite bourgade belge située dans la région Wallonne. On y parle français comme à Liège où il s’est éteint le 3 octobre 1982. Les dates sont posées. Si vous faites le calcul - très simple - vous arrivez à la conclusion qu’il a commencé à bouffer les racines de picenlit à l’âge de 41 ans. Il est toujours trop tôt pour se mettre à la table de ce banquet végétarien, même pour un écolo. Comme il n’a vécu qu’une moitié de vie, il n’a retenu que la première moitié du nom de son bled natal : War. Il a zappé le mot sage, pas eut le temps, pas envie. Son existence est une guerre, c’est tout. Une guerre contre l’ennui, une guerre contre le médiocre. Tant pis pour les morts que ça causerait, ils ne pouvaient qu’avoir tord.
Roger Claessen est mon idéal footballistique – comme on parle d’idéal féminin ou d’idéal artistique. Dans ma tête, c’est une fantasmagorie ; la rationalité est chassé pour laisser place à toute la mystique qu’il représente. Aujourd’hui plus que jamais, il faut être Claessenement réactionnaire. Montrer par lui toute la grâce d’un sport qui quoi qu’on en dise perd de sa superbe. Bien sur, il n’est pas le seul phare d’une époque révolue. On ne peut oublier les Best, Cruyff et autres héros cosmiques ; tous ces joueurs qui ont fait les beaux jours de la génération de mes parents. Tout cela est mort avec Maradona et Cantona. J’ai définitivement un temps de retard en tout. Hors jeu le mec ! Ils ne m’ont pas attendu, c’est affreux. Je n’aurais pas eu le loisir de voir évoluer des types de cette trempe. Plus rien n’était fait pour eux. L’heure est à l’argent seule motivation du premier footeux professionnel, l’heure est à la langue de bois, au joueur aussi lisse qu’idiot. Le roi est mort, vive le vide.
Claessen donc. Pour continuer à espérer. Pourquoi lui plutôt qu’un autre ? Peut être parce que l’histoire l’a un peu plus oublié, surement parce qu’il avait en plus une profonde admiration pour la littérature en générale et pour Dostoïevski en particulier. Dans ce milieu devenu si policé à sa manière, il faut voir le belge comme un homme, un vrai. Toute sa vie il a pensé le foot comme un plaisir. On l’imagine facilement considérer que le sport n’est qu’un art mineur – puisqu’il connaissait les autres ! – comme Gainsbourg considérait la chanson. Le football n’était pas tout. S’il avait été prêt à faire les efforts – et donc à sacrifier une partie de sa vie – on trouverait aujourd’hui sa face si incroyablement masculine sur des tonnes de t-shirts. Tant mieux qu’il se soit abstenu, qu’il soit resté fidèle à ce qu’il devait être : pas un footballeur : un monsieur. Vouloir le réduire au gazon vert n’a aucun sens. Roger fait éclater les lignes de touches ! Laissez lui de la place, Claessen fait exploser les stades !
Quels stades ? Celui du Standard de Liège d’abord, évidemment ! Le stade Maurice Dufrasne : l’enfer de Sclessin ! Réputé pour la ferveur de ses tribunes. C’est là qu’il a trouvé ses supporters les plus fidèles, le plus endiablés ! Quel régal pour eux de voir un week-end sur deux ce géant enchaîner les buts dans une ambiance de folie. Dix saisons avec les rouges, 229 matchs pour 161 buts : si ce n’est pas une histoire d’amour ça !
Mais la première fois que je l’ai vu jouer – dans une vidéo que l’on peut retrouver grâce au site de l’INA – c’était dans une enceinte qui a un goût particulier pour moi : Marcel Saupin.